L’exclusion dans le monde contemporain, l’exemple paradigmatique de Thésée, roi juste, devenu bouc émissaire dans le théâtre d’aujourd’hui
une contribution rédigée par Despoina NIKIFORAKI
dans le chapitre « Le rite du bouc émissaire à l’initiative de la Bible ? »,
chapitre 2 du livre Bouc émissaire : le concept en contextes, dirigé par Rémi CASANOVA et Françoise-Marie NOGUES,
publié aux PUS, en novembre 2018
Le texte commence par ceci :
« Didier-Georges Gabily, auteur de théâtre contemporain, directeur d’acteurs et romancier, décède prématurément à l’âge de quarante et un ans. Il laisse derrière lui une œuvre pleine de sens, renfermant une pensée pénétrante et aiguë, une langue porteuse, et un point de vue rocailleux et sensible sur le monde actuel, décadent et brutal. Il fonde le groupe T’Chan’G et, en 1994 et 1995, il écrit et crée avec sa troupe Gibiers du temps, pièce qui se déplie comme un triptyque, jouée en son intégralité en 1995 au Théâtre de Gennevilliers. Les principaux héros sont Thésée et Phèdre, qui, séparés par le temps et l’espace, vont se rejoindre pour coller les morceaux de leur histoire et rejouer ainsi le mythe.»
et se termine par ceci :
« Cependant, cette réunion se produit de façon éphémère ; dès son arrivée, la présence de Thésée arrête un processus de dérèglement qui perdurait durant des siècles mais elle met aussi brutalement fin au mythe de Phèdre. Pour conclure, si l’on suit la théorie girardienne, le bouc émissaire sera reconnu non coupable pour Gabily. Et si justement le bouc émissaire se fait innocenter par rapport à ses ancêtres mythiques, qui, eux, étaient jugés coupables par les auteurs, c’est parce que l’intrigue gabilienne a réalisé l’extension de la durée du mythe jusqu’à l’oubli des faits. Ainsi, le héros gabilien revêt au surplus un habit christique..»
On y trouve notamment :
« L’Homme supérieur renonce donc finalement à vouloir remplacer Dieu et préfère ne rien vouloir que vouloir le néant. Le dernier homme préfigure alors la fin du nihilisme et l’homme qui veut périr annonce réellement son achèvement. Pour Nietzsche, le nihilisme est vaincu par soi-même,»
« Par le biais de ce mot, nous entrapercevons donc un rapprochement dissimulé entre le Thésée de Gabily et l’Œdipe de Sophocle.»
« Le rôle d’Œdipe est, pour Girard, « celui d’un véritable bouc émissaire humain » (ibid., p. 119). Il est le héros par qui la cité retrouve finalement l’ordre et la paix qu’il a lui-même perturbés. Car, à la période « maléfique » du bouc émissaire succède la période « bénéfique » ; le déchaînement des haines est alors suivi par l’accalmie et la cessation de la violence (ibid., p. 130). »
Livre Bouc émissaire, le concept en contextes, présentation de la contribution de Despoina Nikiforaki : ICI
Despoina NIKIFORAKI
Despoina Nikiforaki est diplômée en théâtre et en lettres classiques. Investie dans la pratique théâtrale, elle a travaillé comme assistante à la mise en scène, puis comme dramaturge pendant de nombreuses années. Elle est enseignante-chercheur en Arts du spectacle à l’Université de Montpellier III et à Paris 3-Sorbonne Nouvelle.