« Le rituel du Bouc émissaire »
un article de Bernard Maruani
paru dans la revue Pardès,
vol. 58, no. 1, 2016, pp. 23-36.
Plan de l’article
- Un rituel hors normes
- Un rituel déritualisé
- Restriction et licence sacrificielles
- Licence sacrificielle et idolâtrie
- Samson à Azazel
Dès les toutes premières lignes, l’article plante le décors : « Accompli une fois par an le jour du Kippour (Pardon), il avait pour fonction, stipule le texte, de décharger de ses fautes le peuple en les transférant sur un bouc que l’on « expédiait (chalah) », « à Azazel », « au pays de la taille », « dans le désert » 1. Le Talmud précise le sens de chacun de ces termes, et par là révèle le sort qui attendait le bouc émissaire, une fois mené au désert.
Concernant Azazel, le texte nous éclaire beaucoup : « « Azazel » est ainsi décomposé en ‘az et el (férocité et violence) ; « au pays de la taille », parce que le rituel se déroulait dans un massif fait de rochers tranchants, au sommet de la montagne la plus escarpée ; et le texte ajoute « dans le désert », c’est-à-dire, commente le Talmud, hors de tout espace habité. »
L’hypothèse est originale et bien développée : » Le rituel du Bouc émissaire se présente donc comme une sorte de sacrifice d’exception : par rapport aux règles régissant tous les autres sacrifices, c’est tout le contraire d’un sacrifice. »
Un parallèle très intéressant est proposé avec d’autres rituels : « De fait, il existait d’autres rituels qu’on pourrait inclure, puisque sanglants, dans l’orbe du sacrificiel, mais qui n’en relevaient pas formellement puisqu’exécutés à l’extérieur du Temple, parfois sans chehita et jamais avec une offrande à l’autel. C’était le cas de la Vache rousse, qui était abattue sur le Mont des oliviers et intégralement consumée sur un bûcher dressé sur place ; c’était aussi le cas des deux oiseaux « semi-sauvages »24 du rituel de purification du lépreux, dont l’un était abattu à l’extérieur du Temple et l’autre « renvoyé (michtalahat25, cf. le michtaléah du Bouc émissaire) » vers « l’espace sauvage » ; le rituel dit de la Génisse à la nuque brisée (‘egla ‘aroufa) se déroulait dans un terrain en friche26. Dans ces procédures que nous qualifierons de para-sacrificielles, le rituel est abrégé, parfois réduit à sa plus simple expression, quasi allusive. Ainsi, dans le rituel de la Génisse à la nuque brisée, l’obligation de mettre à mort avec un outil ne s’accomplit plus par une entaille pratiquée avec précaution à la gorge avec un couteau effilé, comme dans la chehita rituelle, mais d’un coup de hache asséné sommairement sur la nuque. »
Pour l’article en entier, via cairn : Ici